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Jacques de Sibour (1896 - 1979)


Une vie d'aviation


            La jeunesse et la guerre


                Jacques (Jean Gabriel Osmond) de Sibour nait à Cannes le 8 avril 1896. Ses parents, Louis Jean Théodule Francisque, Comte de Sibour, et Kathryn Bailey se sont mariés en 1890 à New York où son grand-père a émigré au 19° siècle. En 1890, son père est reveu s'installer en France. Leur premier enfant, Louis, est né à Paris en 1891. Jacques de Sibour effectue des études littéraires en France et en Grande-Bretagne. En 1914, étudiant en lettres ayant obtenu l'année précédente son baccalauréat, il se rend aux Etats-Unis. Lors de la traversée de Liverpool à New York sur le SS Celtic de la White Star, il fait la connaissance d'une jeune américaine, fille d'un magnat du grand commerce (Macy's, Selfridges), Violette Selfridge; mais l'époque n'est pas aux idylles.

  


                Le 23 décembre 1914, devançant l'appel, Jacques s'engage au 3° Régiment de Dragons. En 1916, séjournat à l'hôpital après plusieurs citations et une blessure, il obtient son transfert dans l'aviation. Il arrive à Dijon comme élève pilote le 15 février 1917, obtient son brevet à Pau le 10 mai. Probablement du fait de son anglais courant, il devient moniteur à Juvisy, passant le reste de l'année 1917, dans plusieurs écoles : Avord, Juvisy, Châteauroux, Pau.


                Le 18 janvier 1918, le Maréchal des Logis Pilote Jacques de Sibour est affecté à la SPA150. Sa carrière en escadrille sera courte : le 4 février 1918, peu après son arrivée, il est cité à l'ordre du 1° Groupe d'aviation pour un combat contre 4 LVG, "réussissant à en désemparer un et mettant les autres en fuite - montrant ainsi une audace et un calme merveilleux joints à une adresse du pilotage très rare". Quelques jours après, suite à un retour tardif de permission, il est, malgré la reconnaissance de circonstances atténuantes, renvoyé au 21° Régiment de Dragons. Il y obtient une nouvelle citation le 17 juillet pour avoir, sous le feu, incendié ... un avion français abattu entre les lignes, évitant qu'il ne tombe aux mains de l'ennemi .

                Le 26 juillet 1918, un éclat d'obus l'envoie à l'hôpital où une greffe s'avère nécessaire. Sitôt sorti, il est victime d'un grave accident et blessé à la tête. Il reste à l'hôpital puis en convalescence jusqu'à sa démobilisation en août 1919. Il est alors versé dans les réserves avec un état de service élogieux.


                Dès sa démobilisation, Jacques de Sibour qui est resté en contact avec Violette Selfridge se rend à Londres pour la retrouver et faire la connaisance de son père, Harry Gordon Selfridge.

Jacques dans un Nieuport en 1917, probablement à Avord (Sibour)


                                Avec son titre de noblesse, son passé d'aviateur, Jacques a la chance de plaire à l'homme d'affaires anglo-américain, qui est depuis le début du siècle convaincu de l'avenir de l'aviation et du marché que cette activité pourra représenter dans ses affaires. Le jour du Nouvel An 1921, la presse anglo-saxonne annonce que l'homme d'affaires anglo-américain, Harry Gordon Selfridge embauche Jacques et lui donne la main de sa fille Violette. Le mariage a lieu à Londres le 5 mai 1921 sous les auspices aéronautiques : un avion est représenté sur le gâteau de mariage. Le jeune couple s' installe à Londres et le 29 janvier 1922 y naît leur fils, Blaise Jean de Sibour.


                De 1921 à 1925, Jacques de Sibour essaie, sans grand succès, de devenir un businessman conforme aux vœux de HG Selfridge. A l'été 1925, il décide de changer de vie, et Jacques part pour le Kenya, suivi d'abord par Violette, puis par leur fils et sa nurse. Louant une maison à N'gong, près de chez Karen Blixen ("Out of Africa"), ils abandonnent au bout d'un an pour tenter - sans plus de succès - leur chance à Madagascar.

La licence de Jacques de Sibour délivrée par le Royal Aero Club le 29 juillet 1927 (Sibour)

Embarquement dans le DH.60G Safari II pendant leur Tour du Monde de 1928-29 (Sibour)


            Pilote de tourisme             


                Les Sibour rentrent donc à l'automne 1926 en Angleterre où Jacques découvre une aviation de tourisme en plein développement. En août 1924, l'Air Council a en effet décidé d'appuyer la création de club d'avions légers en finançant l'acquisition d'appareils et de leur maintenance pendant 2 ans, les clubs assurant le financement du fonctionnement courant, l'acquisition des aérodromes, l'emploi des moniteurs et mécaniciens ainsi que l'assurance des appareils payés sur fonds publics. A la mi 1925, l'Air Council choisit l'appareil de référence: le De Havilland DH60 Moth, équipé du moteur "Cirrus" de 60cv.

                Comparé aux avionnettes équipées de petits moteurs (40cv au plus) à la mode chez les constructeurs individuels, le DH 60 apparaît comme un biplace plus lourd, plus puissant, et donc plus coûteux. Il a le potentiel nécessaire à une utilisation opérationnelle dans des conditions difficiles. Fin 1925, 5 Aero Clubs sont déjà ouverts en Grande-Bretagne; un sixième - le Hampshire Aeroplane Club - dépose ses statuts en mars 1926.

                Le potentiel du Moth se confirme rapidement sous l'impulsion de Geoffrey de Havilland : le 29 mai 1925, Alan Cobham, spécialiste des grands vols, fait un aller-retour Londres - Zurich dans la journée. D'autres vols européens suivent au fur et à mesure de la livraison des appareils : tours de Grande-Bretagne, vol Londres - Dublin, vol Londres - Berlin (et première panne due à un défaut d'alimentation lors du changement de réservoir) par Alan Cobham, etc... Le 15 novembre 1926, deux DH 60 modifiés en monoplace et équipés de réservoirs supplémentaires décollent de Londres. Ils sont pilotés par T.N Stack et le capitaine B.S. Leete. Début janvier 1927, ayant suivi la route des Imperial Airways, ils atteignent leur but : Karachi. D'autres suivent comme R.R. Bentley qui avec un Moth modifié de façon similaire vole de Londres au Cap.


                Jacques de Sibour retrouve aussitôt sa passion du pilotage. En juin 1927, il s'entraîne au Hampshire Aeroplane Club, puis passe les épreuves nécessaires à l'obtention de sa licence internationale le 29 juillet 1927 (n° 8125). Le 20 août 1927, il prend possession d'un DH 60X immatriculé G-EBSS, baptisé Jeunesse. Leur premier voyage se fera de Londres à Paris.

                Le 2 septembre, il est en route pour le meeting de Copenhague avec Violette comme passagère; sa première panne l'oblige à un atterrissage en rase campagne aux Pays-Bas. Il redécolle le lendemain matin, rembarquant à Schiphol Violette qui avait continué par la route. Le meeting de Copenhague confirme les performances du Moth dans sa catégorie. Un Klemm gagne la King's Cup Race suivi par 3 Moth, Jacques se classant 4° derrière son ami John Carberry.


            Safari II et "Flying Gypsies"


            C'est en discutant de la chasse aux grands fauves avec John Carberry, grand chasseur et aviateur kenyan, qui prône l'intérêt de la chasse au tigre en Indochine, que Violette évoque la possibilité de s'y rendre en avion. L'idée fait son chemin, leur DH.60 Jeunesse devient Safari ; Jacques et Violette se passionnent pour l'organisation de ce voyage qui se transforme peu à peu en tour du monde pour éviter le retour en période de mousson. Les traversées océaniques seront effectuées en paquebots. Le projet est finalement annoncé à la presse début mars 1928. Ce projet n'emballe pas les autres membres de la famille et tout particulièrement HG Selfridge qui déclare à la presse : "I wish that Violette weren't going. It is an adventure of hazard and I hate to see her undertaking it".


                Durant les premiers mois de préparation, Jacques enseigne pilotage et navigation à Violette. Pour se donner plus de chances, ils décident de remplacer leur Cirrus Moth par le tout nouveau Gipsy Moth DH 60G équipé du moteur Gipsy de 100cv et doté de réservoirs supplémentaires. Le 14 septembre 1928, l'avion baptisé Safari II reçoit son certificat de navigabilité avec l'immatriculation G-EBZR. Jacques et Violette s'envolent aussitôt pour Le Bourget avec leur appareil aussitôt chargé.


                Après 10 mois d'aventures, Jacques et Violette de Sibour boucleront leur voyage en 10 mois, rejoignant Londres le 21 juillet 1929, prêts à d'autres projets. Jacques est devenu un fervent propagandiste de l'aviation de tourisme et Violette publiera chez Putnam ses souvenirs de voyage sous le titre "Flying Gypsies".


                Dans la Corne de l'Afrique


                A leur retour, les relations avec HG Selfridge se détériorent. Le couple est de plus en plus souvent à Paris. En janvier 1930, Jacques prend livraison d'un nouvel appareil : un DH60 M baptisé Safari III, immatriculé F-AJZT acheté auprès de Morane-Saulnier qui vient d'en obtenir la licence. Partis de Paris le 2 février 1930, ils embarquent à Marseille pour Alger où reprenant leur avion, ils repartent par la Lybie, l'Egypte, le Soudan, l'Erythrée pour atteindre Djibouti. Après un court séjour à Aden début mars pour tenter une visite de Sanaa, qu'ils abandonnent, ils rejoignent avec quelques difficultés Addis-Abeba le 14 mars. Ils y restent une dizaine de jours au terme desquels leur Moth est cédé au Négus. Malgré plusieurs accidents, il servira jusqu'en 1936 comme avion école.

> Plus sur le DH.60M du Négus


                Le couple repart ensuite pour le Kenya en bâteau, rejoignant Nairobi début avril. Ils y achètent un "camion" de 2 tonnes et entreprennent alors une traversée de l'Afrique d'est en ouest qui les amène à Yaoundé où ils prennent le train pour rejoindre la côte et rentrer en France.

  

                

                Paris - Moscou - Pékin et retour


                Début 1931, Jacques et Violette sont de retour en Europe. Violette obtient au début de l'année son brevet de pilote au London Aero Club. Lors de leur tour du monde, Jacques et Violette prévoyaient une visite en Chine que la malaria de Violette avait empêché. Leur nouveau but de voyage est donc Pékin via Moscou et la Sibérie. En juin 1931, Jacques prend possession du Farman F.291 "F-ALER" et le baptise Safari IV. Le 16 juin, Jacques et Violette accompagnés du mécanicien Damet partent du Bourget et atteignent sans encombre Pékin en 10 jours après avoir traversé la Russie, la Sibérie et la Mandchourie.


                Ils y restent pendant deux mois. Jacques y effectue plusieurs vols de propagande,... Le 9 août, il décolle de Pékin pour Nankin, vol de liaison au profit de la Légation de Grande-Bretagne. Pris dans le mauvais temps, il est obligé de se poser à Tsi-Nan-Fou et ne peut donner de nouvelles pendant 48h, son silence semant l'inquiétude. Sa prestation sera d'autant plus appréciée, et les remerciements officiels de la Grande-Bretagne conduisent l'ambassadeur de France à le proposer pour la Légion d'honneur qui lui sera remise en décembre de cette même année.


                Le 25 août, ils décollent de Pékin vers Paris, accompagnés de Madame Wilden, épouse du Consul de France et de son pékinois. Le 1° septembre, ils sont de retour au Bourget, accueillis par Maurice Farman, Paul-Louis Weiller et un représentant des Affaires Étrangères.


> Plus sur la carrière du Farman F.291 F-ALER

1° Septembre 1931 : retour à Paris du F-ALER. De g. à dr. : Damet, Paul-Louis Weiller, Mme Wilden, Violette et Jacques de Sibour, Maurice Farman. (Michel Barriere)


            Le bon samaritain


            L'année des grands voyages vers l'est n'est cependant pas terminée. Le 12 septembre, le Dewoitine D33 Trait d'Union 2 s'écrase à Oufa. Doret est indemne, mais Le Brix et Mesmin décèdent dans la catastrophe. Pour venir en aide à Doret, Jacques de Sibour propose son aide aux services officiels qui la refusé. Emportant des médicaments et des courriers, Jacques et Damet s'envolent néanmoins et rejoignent Oufa. Ils retournent peu après à Krasnoïarsk, où ils embarquent les enquêteurs et Madame Doret, partis par le train et les amènent à Oufa. Tandis qu'un train spécial ramène les officiels et les corps des aviateurs à Paris, Jacques et Doret rentrent par les airs, se posant au Bourget le 23 septembre.


                Jacques et Violette sont désormais connus. Jacques est l'un des premiers membres de l'Aero Club Roland Garros. Il participe à la préparation du raid que veut entreprendre Maryse Hilsz vers Madagascar avec son F.291 F-ALUI Joe II. A la demande de Paul-Louis Weiller, il intervient lorsqu'une panne la stoppe près de Niamey, à Birni Nkonni.


                Jacques, Violette et Damet décollent le 11 février avec leur Farman lourdement chargé de divers outils et d'un moteur de rechange. Trop chargé même ... au point de ne pas pouvoir passer les Pyrénées. Violette convoie alors le moteur par la route jusqu'à Barcelone d'où ils repartent le 17 sans leur chargement, confié provisoirement à l'Aeropostale. Ayant repris leur chargement à Casablanca, ils poursuivent leur route jusqu'à Dakar, puis obliquent vers Niamey qu'ils atteignent le 26 février. Le 14 mars ils repartent pour la France, réparation faite. Le 23 mars, le couple est de retour au Bourget.

De passage à Rabat lors du dépannage de Maryse Hilsz. De g. à dr. : Jacques de Sibour, Myriam Rex (journaliste), Violette, Damet, X, Cne Frahinsholz. (Michel Barriere)

            Aero Trading Company, Hong-Kong


                Le premier semestre 1932 est marqué par le triomphe d'Amelia Earhart et son voyage à Paris, mais les grands voyages ne sont pas terminés. Le 28 août, Jacques, Violette et Damet s'envolent du Bourget vers le Kenya, accompagnés cette fois de leur fils âgé de 10 ans. Ayant traversé l'Espagne et l'Algérie, ils descendent par la route "britannique" : Égypte, puis Brokenhill. Ils restent jusqu'au 1° décembre au Kenya où Blaise tue à 10 ans son premier lion. Le retour s'effectue par l'Afrique Centrale et le Sahara, via Bidon 5 et Reggan, puis l'Espagne pour se poser au Bourget le 3 janvier. Leur deuxième enfant, une fille prénommée Jacqueline, voit le jour en mars à Paris en mars 1933.


                Pour pallier au manque de finances, Jacques décide alors de se lancer dans le commerce d'avions en Chine et, ayant trouvé quelques appuis industriels, s'installe à Hong-Kong où Violette le rejoint rapidement ; en juin, il obtient une commande de 3 Morane-Saulnier MS 225, mais la réalisation de la vente bloquée par la concurrence s'avère difficile et en juillet, Violette rentre à Paris. Grâce à ses relations avec l'épouse de l'ambassadeur de Chine à Paris, elle parvient à débloquer la situation.


                Dès septembre 1933, ils repartent avec leur fils Blaise pour assister à la réception des avions vendus par Jacques, cette fois avec un de Havilland Dragon DH 84 immatriculé "G-ACKD". Partis par Tunis, l'Égypte, l'Asie Mineure et l'Inde, ils arrivent en Chine où Jacques reste quelques temps pour solder ses affaires, en profitant pour voyager en Chine et au Japon tandis que Violette et Blaise rentrent à Paris par bateau. Jacques revient ensuite par Singapour, Calcutta, puis Karachi qu'il atteint le 1° février 1934. Le 15 février, il est à Syrte et rejoint Le Bourget le 1° mars. Du 7 au 17 mars 1934, toujours avec le DH84, il fait un voyage à Berlin et Varsovie, accompagné de Violette et Damet.

            

            La Guerre d'Espagne


                En 1935, Jacques de Sibour devient représentant de Standard Oil à Paris et bénéficie de l'avion de la compagnie. En 1936, il agit plus particulièrement en tant qu'Intava (international Aviation Associates), filiale assurant dans certaines zones la distribution de produits pétroliers.


                En juin 1934, Jacques de Sibour s'inscrit pour la Mc Robertson Race, la grande course Londres-Melbourne. L'appareil inscrit est le Couzinet 150 et le second pilote Rossi. Or Couzinet en pleines difficultés financières a depuis la fin de 1933 arrêté le développement de l'appareil et Rossi a simultanément jeté l'éponge, recherchant un nouvel appareil. Fort logiquement cette inscription n'est pas confirmée suite aux dénégations de Couzinet et Rossi, mais sans que des commentaires de Jacques de Sibour "injoignable" permettent de comprendre l'origine de cette inscription. Jacques participera d'une autre façon à la course en mettant en place pour Intava la logistique pétrolière de la course.


                En juillet 1936, Jacques de Sibour et Violette accompagnent Gordon Selfridge Jr et une amie pour un voyage "de curiosité" en Espagne avec le Dragon de Selfridge's immatriculé "G-AECX". Craignant d'être refoulés à la frontière, ils se posent directement chez les Nationalistes à Burgos et se joignent à une équipe de journalistes en partance pour le front. Ils assistent ainsi à une attaque républicaine, Jacques faisant le coup de feu à cette occasion, puis reviennent vers Burgos, mitraillés en chemin par un appareil républicain pour le vol retour vers Londres. Cet intermède sera diversement apprécié par la presse britannique qui ignorera que Jacques a profité de son retour pour déposer sur un terrain du centre de la France, le Vicomte de Rocamora qui rejoint le roi d'Espagne.


                Frappé par la violence de la guerre civile, Jacques de Sibour décide dès leur retour de se porter au secours des étrangers – notamment une trentaine d'Américains alors bloqués à Grenade. Reprenant le Dragon de Selfridge's, il s'envole pour Tanger avec le soutien de la Standard Oil qui lui obtient un laissez-passer du Général Quelpo de Llano pour des aller-retour entre Tanger et Grenade, avec évacuation de  4 personnes à chaque voyage. Son premier vol est prévu le 9 août. Le 12 août, il ramène 4 américains. Il revient ensuite en Grande-Bretagne.

            Amelia Earhart


                Depuis plusieurs années, Jacques et Violette de Sibour sont amis d'Amelia Earhart et de son mari, l'éditeur George Putnam. C'est d'ailleurs Putnam qui a publié en 1930 sous le titre Flying Gypsies la rédaction par Violette de leur tour du monde en Moth. Jacques et Violette sont parmi les premiers à la féliciter à son arrivée à Londonderry après son vol en solitaire le 21 mai 1932, le Lockheed Vega étant pris en charge pour réparation par Selfridge et exposé dans le magasin londonien.


                Le 3 juin 1936, Amelia Earhart entreprend un voyage triomphal sur le continent, accompagnée de son mari et de Jacques et Violette. Diverses réceptions et visites les attendent à Paris du 3 au 7, dont une participation au meeting de Saint-Germain où Jacques les pilote dans le F.291 de P-L Weiller. Amelia est ensuite accueillie à Rome du 8 au 10, sans les Sibour ... qui ont manqué le train. Jacques les amène ensuite avec son Farman à Bruxelles. Amelia et son mari repartent ensuite par Cherbourg aux États-Unis le 14.


                En 1937, Jacques qui travaille pour Intava et est désormais considéré comme un expert dans son domaine joue un rôle actif dans la préparation de la deuxième tentative de tour du monde d'Amelia Earhart, à la fois professionnellement et par sa connaissance personnelle des pays traversés.

                La première partie du trajet dans le sens Ouest-Est implique en effet la préparation une logistique sans faille, tant au plan politique que technique, pour la traversée de l'Afrique et du Moyen-Orient.

                De voyage en Inde, il accueille Amelia et Noonan à Karachi le 16 juin et assistera à leur départ pour Calcutta le 17. Il est d'autant plus touché par leur disparition quelques jours après.

De g. à dr., Noonan, Amelia Earhart accueillis par Jacques de Sibour à Karachi en juin 1937 (NYTimes)

Jacques et Violette en voyage aux Indes posant le Percival Q6 Petrel G-AFGX d'Intaca en mars 1939 (Sibour)

Carte d'officier de Jacques de Sibour au QG D'Aden en décembre 1940 (Sibour)

Portrait de Jacques de Sibour en commandement à l'OSS Kunming  en 1944 (Sibour)

            1939 - 1945 : RAF, FAFL et OSS


                Les grands voyages à caractère aventureux s'arrêtent à cette époque, mais l'activité professionnelle subsiste avec l'avion d'Intava, un Percival Petrel. En 1938, Jacques et Violette réalisent ainsi un tour des aéroports indiens pour Esso, passant par Tripoli où ils déjeuneront pour la dernière fois avec Balbo qui leur confiera son antipathie croissante pour la politique de Mussolini. Ils ne rentreront à Londres qu'après Pâques 1939 : la guerre est là.


                Mobilisé fin 39, Jacques est renvoyé dans ses foyers en février 40. Rentré à Londres, il demande dès mai 40 à servir sous l'uniforme de la RAF qui décide de l'envoyer au Moyen-Orient. Violette part pour leur ferme du Kenya, accompagnée de leur fille Jacqueline en pension qu'elle passe prendre à Paris; toutes deux parviennent à rejoindre Marseille où elles embarquent sur le dernier navire pour Alexandrie. Le 14 juin, Jacques reçoit sa nomination comme "pilot officer" et rejoint Le Caire en uniforme de Squadron Leader. Violette partira ensuite pour Nairobi.


                Leur fils, Blaise après avoir tenté de s'engager travaille pour De Havilland en Angleterre d'abord, où il participe à un crash program d'amélioration des Spitfire pendant la bataille d'Angleterre, puis en Égypte. Rattaché d'abord à la RAF en Libye, il rejoint les FAFL le 1° mars 1942. Volontaire pour le Groupe de Chasse Normandie, il le rejoint le 3 août 1943. Il est porté disparu le 31 août 43 dans la région d'Yelnia, le même jour qu'un autre aviateur et pionnier des voyages aériens également au Normandie, Paul de Forges.


                Jacques de Sibour servit dans la RAF notamment comme officier de renseignement en 40 et 41 au Quartier Général de la RAF au Moyen Orient. Il fut impliqué dans l'offensive du Levant, ainsi que probablement dans la campagne d'Érythrée dont un grand drapeau ramené en souvenir fut utilisé par Violette pour arranger leur maison d'Accra. Mais son action parait avoir été plus particulièrement en relation avec la création de la route de convoyage de Takoradi. A l'été 1941, il fut affecté au No 203 Group à Khartoum, pendant les quelques mois où un effort particulier y fut demandé compte tenu de l'occupation de la Grèce. En décembre 41, Jacques se voit proposer de rejoindre les Pan American Airways qui s'implantent en Afrique pour l'USAAC. Il accepte mais lors d'une mission en janvier 41 aux États-Unis demande à rejoindre les FAFL. Fortement soutenue par les Américains, cette demande de transfert -  en pleine période de crise avec les anglo-américains - cette demande est vivement refusée par le Général de Gaulle, bien qu'initialement acceptée sur le terrain le 1° mars 42 par Astier de Villatte, Corniglion-Molinier et Catroux. Démissionnant alors de la RAF, Jacques est détaché auprès de Pan American.


                Entre temps, suite à diverses questions administratives de paye et de grade, la présence de Jacques aux FAFL Moyen-Orient est remontée à Londres et le Général de Gaulle confirme très vivement son refus de le voir aux FAFL.


                En juin 42, Jacques, parti en mission aux USA, revient avec l'État-major du Brigadier General Fitzgerald qui s'implante à Accra. Du 5 au 24 juillet, Jacques s'envole comme copilote et navigateur d'un avion de Pan American pour "ouvrir" la route du Congo partant de pointe Noire par Brazzaville, Léopoldville et Nairobi, et qui devait se prolonger vers l'Australie par les iles de l'Océan Indien. A son retour, il s'engage définitivement dans l'USAAC. En décembre 1942, il fera partie de l'équipage de l'avion transportant Franklin D. Roosevelt au Maroc.


                Après le Ferrying Command, il est affecté en 1944 à l'OSS. Il y assure un commandement opérationnel sur l'aéroport de Kunming en Chine du Sud où il assure la formation et la supervision des agents en Chine du Sud et en Indochine. Lui-même intervient à deux reprises derrière les lignes japonaises pour prendre des contacts avec les autorités locales et récupérer des documents. Il supervise notamment à cette époque le réseau civil créé en Indochine avec le soutien de l'OSS par un canadien, Laurie Gordon, un sino-américain Frank Tan et un britannique Henry Bernard. Il rentre aux États-Unis en 1945.

  

En Indochine non loin de la frontière chinoise et du pont détruit de Lungchow avec le réseau civil GBT. De g. à dr. : Frank Tan, J. de Sibour, Laurie Gordon et Harry Bernard (Sibour)

Jacques de Sibour avec les personnels de l'OSS Kunming pendant les fêtes de Noël 1944 (Sibour)


            L'après guerre


                Le 14 mars 1946, dès sa démobilisation, Jacques rejoint le bureau de Londres des American Overseas Airlines, filiale d'American Airlines. Le 1° avril, il est affecté comme Regional Traffic Manager a Paris, puis en juin 1947, il est nommé European Sales Manager au bureau de Londres. Sa résidence a l'étranger lui interdit de bénéficier de l'entrainement dans l'US Air Force qu'il aurait souhaité en tant que réserviste.

                En 1948, Jacques et Violette se séparent. Leur divorce, demandé en janvier, est prononcé a Reno le 2 fevrier 1949. Le 11 février, Jacques se remarie avec une americaine, Elvira (Vera) Brokaw Fairchild. Le 15, Jacques est nommé vice-president et directeur général d'American Airlines à Mexico. Il en démissionne en octobre pour des raisons personnelles et rentre aux Etats-Unis. C'est en Jamaïque qu'il s'installe avec sa nouvelle épouse, plus précisement à Pimento Hill, prés de Montego Bay.

                En août 1950, alors que la Guerre de Corée vient de débuter, Jacques propose de nouveau ses services au quartier général de l'Air Command des Caraïbes. Sa proposition est apparemment étudiée favorablement à l'échelon local, mais la réponse finale sera négative pour raisons administratives, du fait de son affectation à l'Army Military Intelligence Reserve. Suggestion lui est faite de prendre contact avec le représentant de l'US Army aux Caraïbes, mais il ne semble pas qu'il y ait donné suite.

                Aprés le décés de sa deuxième épouse en 1965, il se remarie avec Patricia Chewan, fille d'un grand armateur de New-York. Il se retire un peu plus tard au Portugal ou il décède, a Lisbonne, a la fin du mois d'avril 1979.

Autres pages concernant Jacques de Sibour :



- Le tour du monde de Safari II (pdf, 22 pages)


- Safari III en Ethiopie


- Le Farman 291 Safari IV

 Jacques de Sibour

Tous droits réservés - Michel Barrière - crezan.aviation@gmail.com