Crezan
F190
Crezan

F.291 n° 2 / 7262

F-ALER


¤ Le rêve de Pékin


            Fin 1930, Jacques et Violette de Sibour qui ont déjà acquis une certaine notoriété par leurs voyages antérieurs, notamment leur tour du monde, en Gipsy Moth obtiennent de Farman et Gnome Rhône l'acquisition dans des conditions préférentielles d'un F.190.


            Le projet du couple est d'effectuer le voyage à Pékin que les événements ne leur ont pas permis de mener à bien lors de leur tour du monde de 1928-29. Plutôt que de suivre la ligne Paris - Indochine, désormais classique, ils décident de traverser la Russie d'est en ouest. Pour obtenire les visas et autorisations de survol nécessaires, ils comptent sur les bonnes relations établies avec Litvinov, ministre des affaires étrangères de l'URSS, par Violette et son père, Gordon Selfridge lors d'un voyage commercial en 1925. Si cette démarche échouait, ils repartiraient vers l'Afrique : en janvier 1931, ils envisagent ainsi d'effectuer en mars un voyage avec Reginensi sur le trajet Paris- Le Caire – Djibouti – Dakar (raid qui sera effectué par d'Estailleur-Chanteraine en 1932).

            Début février, Jacques de Sibour commence à s'entrainer sur F.190. En mars, il fait quelques vols d'entrainement au PSV.


            Début 1931, Paul-Louis Weiller et Farman décident l'adaptation sur le F.190 du moteur GR 7Kb "Titan Major" de 300 cv, version qui prendra la dénomination de F.291. Deux appareils en cours de montage sont retenus pour être ainsi équipés : un F.197 sanitaire invendu, le n°4 F-ALEZ, qui sera destiné à Paul-Louis Weiller et l'appareil de Jacques de Sibour, de type inconnu, dont le voyage assurera la promotion du type.

            Fin mars, le F.291 est au montage à Toussus-le-Noble; Jacques et Violette font connaissance avec le mécanicien Damet qui les accompagnera. Début avril, les premiers vols ont lieu.

             Le 17 avril, il ne reste plus à faire qu'un essai d'adaptation d'hélice. La presse commence alors à évoquer leur voyage Paris – Tokyo; le 22 avril, les premières réponses soviétiques étant favorables, le voyage Moscou - Pékin se présente bien malgré les atermoiements des bureaux du Ministère de l'Air et le projet est rendu public. A la mi-mai, visas et autorisations de survol sont acquis. Restent à obtenir les documents de l'avion qui doit passer au service Technique à Villacoublay. Malgré son numéro de série 2, il semble que cet appareil ait participé à la qualification du type, permettant ainsi à Jacques de Sibour d'effectuer son raid dans le calendrier prévu.

Le F.291 "Safari IV" de Jacques de Sibour en 1931. [© Michel Barrière]

¤ Paris-Pékin et retour

 

            Le 10 juin, alors que le F.291 poursuit ses essais officiels au S.T.I.Aé, Jacques de Sibour espère encore partir le 12, mais son attente se prolonge jusqu'au 15. Ce jour-là, la météo annonçant l'arrivée d'une dépression prolongée allant vers l'est, il décide son départ, bien que le CdN de l'appareil soit toujours bloqué dans les bureaux du ministère de l'Air. Menaçant de recourir au ministre, Violette parvient à le récupérer tandis que Jacques finit de préparer l'avion. A 20H00, le départ est confirmé pour le lendemain.

            Le 1 juin 1931, le F.291 n°2 reçoit les CdN / CdI 2839; il est enregistré au nom de Jacques de Sibour qui le baptise Safari IV. L'avion est équipé d'un démarreur Farman à cartouches, d'une hélice métallique Chauvière. Il est équipé de réservoirs supplémentaires en cabine. Peint aux couleurs Farman en bleu et argent, il porte un bandeau tricolore en diagonale à l'arrière du fuselage.

            Le 16 juin à 5h00, Jacques décolle du Bourget avec Violette et leur mécanicien Damet. Belle journée, légère brise de l'arrière qui pousse Safari IV à 225 km/h. L'équipage arrive à 10H00 à Berlin-Tempelhof et déjeune pendant les formalités administratives, puis repart vers Königsberg, Smolensk et Moscou. Les turbulences sont violentes au point de briser le strapontin de la cabine où Violette est installée. Pour avoir un moment de répit, Jacques fait une brève escale à Stolp, en bordure du corridor polonais, avant d'atteindre Königsberg vers 17h00. Retardés par une mauvaise organisation de Shell, ils abandonnent vers 19h30 tout espoir de continuer, passant la nuit sur place, invités par le représentant de Shell qui veut se faire pardonner.

            Le 17, Jacques trop fatigué au réveil repousse à 7H30 le départ prévu à 4h00. Au-dessus du village frontière de Bigosovo, il prend l'altitude imposée de 200 ft et, par un temps tournant à l'orage, suit la voie ferrée sans prendre la peine de contourner quelques zones interdites. A l'heure du déjeuner, le Farman se pose sur l'aérodrome militaire de Smolensk. Accueil convivial, aménagement succinct, fraternisation avec l'interprète qui a passé sa jeunesse à Chicago, ville natale de Violette. L'examen prolongé de leurs documents retarde leur départ et ils ne parviennent à Moscou qu'au coucher du soleil, se posant par erreur sur la partie militaire du terrain avant de rejoindre en roulant le secteur civil, non aménagé.

            Dans la matinée du 18, par un temps couvert et orageux, Safari IV, lavé par les mécaniciens russes, décolle pour Sverdlovsk. La navigation consiste à suivre la voie du transsibérien, des terrains de secours clairement indiqués existant à intervalles réguliers. Les gares sont utilisées pour fournir des informations météo par de grandes lettres : H pour le mauvais temps, D pour le beau temps. Après avoir survolé Nijni-Novgorod, l'équipage déjeune à Kazan et, à 17H00, arrive à Sarapoul où il décide de passer la nuit, craignant d'arriver à Sverdlovsk dans l'obscurité par suite du décalage horaire.

            Leur voyage se poursuit avec des escales successives à Omsk le 19, Krasnoïarsk le 20, Irkoutsk le 21 où ils font une escale d'une journée avant d'atteindre Tchita le 23. Le 24 juin, ils partent pour la Mandchourie, se posant à Moukden après une escale à Kharbin. Sur demande du consul, "afin de mieux servir la propagande française", Sibour effectue des présentations à Kharbin et à Moukden. Le 26 juin, le Farman se pose à Pékin, au terme de dix jours de voyage.


            Pendant que son épouse fréquente la bonne société de Pékin, Jacques de Sibour, avec le soutien de l'attaché militaire français, le Commandant Fieschi, effectue des baptêmes de l'air et des vols de démonstration autour de Pékin, à Peita Ho par exemple.

            Début août, Sir Miles Lampson, ambassadeur du Royaume-Uni à Pékin est chargé de délivrer un message spécial aux autorités chinoises de Nankin, mais y reste bloqué par la guerre civile. Le 9 août, Jacques de Sibour décolle pour Nankin pour ramener l'ambassadeur britannique au-dessus d'un pays fort agité. Le mauvais temps l'arrête à Tsi Nan Fou. Dans un pays sans communications, son silence soulève l'inquiétude; pas totalement à tort d'ailleurs, puisque pendant ce voyage, le Farman recevra deux balles dans le fuselage.

            Cette mission vaut au pilote une lettre officielle de remerciement du gouvernement britannique au gouvernement français qui permettra au consul de France à Pékin, Monsieur Wilden, de demander la légion d'honneur pour le pilote.

"Safari IV" atterrisant à Moukden en juin 1931 [L'Aéronautique]

"Safari IV" en Russie au retour de Pékin en août 1931

De g. à dr. x,x, Jacques de Sibour, Violette de Sibour,  x, Mme Wilden, Damet et Confucius [Coll Sibour]

            La narration que fait Violette de leur voyage de retour dans ses mémoires (non publiées) diffère quelque peu des comptes-rendus officiels. Le Farman reprend la route du retour le 25 août transportant Madame Wilden, épouse de l'ambassadeur, et son pékinois Confucius. Leur vol commence directement vers le nord à travers le désert de Gobi. Les voyageurs font une escale à proximité d'un village, non loin de la frontière, pour se procurer deux bidons d'essence qui leur permettent de rejoindre Tchita à la tombée de la nuit après une journée de 12h45 de vol. Ils en repartent le 26, ravitaillés et reposés, suivant à nouveau la voie du transsibérien. Après avoir survolé Irkoutsk, ils se posent à la nuit tombante près du bourg de Nijni Udinsk.

            Le 27, la brume marquant le début de l'hiver sibérien est présente au décollage. Pendant le vol, le temps se dégrade rapidement et finit par leur imposer un atterrissage en rase campagne, le long de la voie ferrée à une heure de marche d'une station ferroviaire qui leur permet de bénéficier d'un bol de bortsch et d'envoyer un télégramme à Novosibirsk pour les informer de leur position. Une légère amélioration leur permet dans l'après-midi de rejoindre le terrain de secours de Tyga, à 200 km de Novosibirsk. Peu habitués à une telle visite, les habitants se précipitent pour recueillir des souvenirs de l'avion que Jacques et Violette s'efforcent désespérément de protéger tandis que Damet, monté sur l'appareil, harangue la foule (en français). Une troïka au galop dégage enfin l'appareil en tournant autour, courant à chaque instant le risque d'accrocher les ailes. L'équipage s'abrite pour la nuit dans une hutte collective sans qu'on leur prête aucune attention. Chassés à minuit par de nouveaux arrivants, ils trouvent place dans une autre, tout aussi peuplée mais plus accueillante, où on leur offre un bol de lait, un morceau de pain noir, quelques concombres et une pièce dotée d'un matelas. En tant que pilote, Jacques se voit offrir le matelas et ses puces par les autres voyageurs qui se répartissent sur le plancher couvert de vêtements épais.

            Au petit matin du 28, le Farman et ses occupants décollent sans regret de Tyga et auraient ravitaillé à Omsk avant de rejoindre Sverdlosk. Le 29, ils passent la nuit à Kazan. Le 30, après un bref arrêt pour déjeuner à Moscou, ils survolent Velikiye Luki et se posent à Königsberg. Le 31, après une escale à Berlin, le mauvais temps les arrête à Bruxelles pour la nuit. Ils arrivent enfin au Bourget le 1° septembre, ayant parcouru 27.185 km depuis Pékin.

¤ Au secours de Doret


            Le 13 septembre, Jacques de Sibour embarque à Toussus médicaments et messages de sympathie destinés à Doret, se pose à 14H40 au Bourget pour accomplir les formalités de douane puis décolle dés 14H47 vers Berlin. A 17H30, il s'arrête à Stendal, à 100km de Berlin. Reparti le lendemain à l'aube, il fait escale à Berlin Tempelhof de 6h30 à 8h00, atteignant Königsberg à 17H00. Le mardi 15, il atteint Moscou à 15H25, en repart le matin suivant à 7h30 et arrive à 14H30 sur les lieux de l'accident.

            Le jeudi 17 septembre, les cercueils de Le Brix et Mesmin sont transportés à Oufa par bateau. Au débarcadère, ils sont accueillis par les représentants du gouvernement des Bachkirs et de l'Ossoaviachim, ainsi que par Doret et Jacques de Sibour qui ont rejoint Oufa d'un coup d'aile. Les cercueils sont embarqués sur un train spécial pour Moscou, Sibour et Doret restant à Oufa pour attendre la commission technique et Madame Doret qui arrivent le lendemain. Jacques de Sibour les transporte alors sur les lieux de l'accident.

            Le 21, le train spécial arrive à Moscou. Les cercueils sont transférés dans l'église catholique de Saint-Louis des Français avant de repartir vers la France. A 14H30, Jacques de Sibour revient d'Oufa avec Marcel Doret et son épouse. Le mardi, dans la soirée, Marcel Doret et son épouse ainsi que Monsieur Dewoitine prennent le train spécial transportant à Paris les cercueils de Le Brix et Mesmin.

            Le 23, à 8h30, Jacques de Sibour quitte Moscou pour Berlin qu'il quitte le lendemain à 11H16 pour Düsseldorf. Le 25, il arrive au Bourget à 15H32 où M.Girardot, commandant du port aérien du Bourget, le remercie au nom du Ministre de l'Air, M. Dumesnil. Les obsèques de Le Brix et Mesmin ont lieu le samedi 26 septembre, à 10H30, à Notre Dame de Paris.

Transfert des cercueils de Le Brix et Mesmin du débarcadère à la gare d'Oufa le 17 septembre 1931 [Coll Sibour]

Arrivée de "Safari IV" au Bourget le 1° septembre 1931

De g. à dr. : Damet, Paul-Louis Weiller, Mme Wilden, Violette de Sibour, Jacques de Sibour, Farman [Coll Michel Barrière]

            Selon sa coutume, Violette finit alors de décorer le côté gauche du capot par des dessins décrivant les péripéties de leur voyage ou reprenant les insignes d'unités et images rappelant leurs voyages antérieurs en DH Moth.

            De son côté, Jacques de Sibour rassemble et rédige les acquis de son expérience pour en faire profiter les aviateurs intéressés. Les premiers sont Doret et Le Brix qui réitèrent leur tentative de record de durée et distance avec le Dewoitine "Trait d'Union II". Le 12 septembre, leur appareil s'écrase à Oufa, dans l'Oural. Si Doret en réchappe, Le Brix et Mesmin meurent dans l'accident.

            Jacques de Sibour se met immédiatement à la disposition de Dewoitine et des familles pour apporter de l'aide sur place à Doret. La mission d'enquête du ministère de l'air, composée de Martinot-Lagarde, ingénieur hors classe de l'aéronautique et de Vernillat, ingénieur en chef, refuse son offre et prendra le train.

            

            Du 1° au 11 octobre, le F.291 F-ALER est exposé au Salon de l'Aviation de tourisme organisé par Saint Didier Aviation, qui se déroule parallèlement au Salon de l'automobile.  

¤ Au secours de Maryse Hilsz


            Le 4 février 1932, volant vers Madagascar avec son F.291 F-ALUI "Joe II", Maryse Hilsz tombe en panne à N'Birni . Un moteur de rechange lui est nécessaire. Le 7 février, Jacques de Sibour propose à Paul-Louis Weiller d'assurer le transport du matériel : un moteur Gnome-Rhône Titan Major 7Kb et des pièces détachées. Son épouse et Damet l'accompagneront. Pour charger le moteur de rechange qui menace d'écraser l'équipage en cas d'accident, les réservoirs supplémentaires du F-ALER sont démontés, ce qui réduit de moitié la capacité en carburant. Cette perte d'autonomie a pour conséquence de leur interdire la route du Sahara au profit de la route côtière de l'Aéropostale par le Rio del Oro et Dakar.


            L'avion n'est prêt que le 10 février. Le 11 à 10h35, pour éviter le mauvais temps installé sur la vallée du Rhône, Jacques s'envole vers le sud-ouest. Faux départ et une heure de perdue : l'huile trop froide lui impose de faire demi-tour. A 13h00, Jacques se pose à Bordeaux pour réparer le radiateur qui perd de l'huile. Le lendemain, reparti de Mérignac à 14h25, le Farman se pose à 16h30 à Perpignan sous la neige.

            Le mauvais temps prolonge la durée de l'escale. Le 14 février, une accalmie leur permet de décoller à 12h30, mais, passé le Perthus, c'est un véritable ouragan. Maîtrisant difficilement l'avion surchargé, Jacques se pose en catastrophe près de Gérone dans un pré au flanc d'une colline. L'atterrisage se passe bien, mais il n'est pas question d'en repartir à pleine charge. Damet dirige le démontage du moteur de rechange, des paysans leur prêtant une charette pour assurer le stockage et le transport des pièces détachées. En fin d'après-midi, Jacques et Damet décollent vers Barcelone, laissant à Violette la responsabilité du chargement. Contrôlant péniblement le Farman dans la tempête, Jacques finit par se poser sans dégât sur le terrain ravagé d'El Prat de Llobregat où deux avions ont été retournés par le vent. Le Farman y est mis à l'abri avec l'aide de Latécoère. Pendant ce temps, Violette rejoint Gérone en stop pour louer un camion ... mais c'est dimanche et elle se voit contrainte d'attendre le lendemain. Ayant loué un vieux camion, elle y transfère avec l'aide des fermiers moteur et pièces détachées avant de rejoindre Barcelone.

            Si le Farman a bien supporté ces épreuves, Jacques et Damet ne sont guère tentés de poursuivre le voyage en surcharge dans le mauvais temps qui se maintient sur l'Espagne. Le 17 février, ils négocient avec l'Aéropostale le transport jusqu'à Casablanca du matériel sachantr que le courrier bloqué par la tempête (320 kg de lettres et 90 colis) est néanmoins prioritaire.

            Le 16, une longue étape mouvementée le long de la côte amène le Farman à 18h30 sur le terrain de l'Aéropostale à Malaga. Le 17, il s'envole à 8h50, fait une brève escale à Gibraltar pour se renseigner sur la météo, puis à Rabat de 10h15 à 11h45 avant d'atteindre Casablanca le soir. Jacques pense d'abord n'attendre son chargement que quelques heures, mais le mauvais temps continue de sévir sur l'Espagne et leur séjour à Casablanca se prolonge pendant 5 jours.

            Le 23 février, de nouveau chargé, le Farman rejoint Agadir et, le 24, reprend sa route vers le sud, faisant escale à 8h15 à Cap Juby et à 11h45 à Villa Cisneros où l'équipage est accueilli à bras ouverts pour le déjeuner avant de rejoindre Port Etienne. Reparti le 25 février à 7h30, ils font escale à Saint Louis du Sénégal de 11h00 à 15h00 pour se poser à 17h46 à Dakar sur le terrain de l'Aéropostale. Dès le lendemain, ils repartent vers Kayes et Bamako. Le 28 février, Jacques suit le cours du Niger jusqu'à Ségou, puis vire vers Niamey où Maryse Hilsz les voit arriver avec plaisir.

            Laissant la remise en état de "Joe II" aux bons soins de Dronne et Damet, Violette, Maryse et Jacques louent des chevaux et chassent. Leur séjour à Niamey durera jusqu’au 13 mars, les administrateurs du territoire mettant à profit leur présence pour organiser des vols de propagande et justifier l'existence de terrains peu utilisés.

"Safari IV" en escale à Dakar sur la route de Niamey le 25 février 1932

De g. à dr. : Jacques de Sibour, la journaliste Myriam Rex, Violette de Sibour, Damet, x, Cne Frahinsholz [Coll Michel Barrière]

            La réparation achevée, Jacques et Violette reviennent vers Dakar, y passant la journée du 14 mars. Le lendemain, ils consacrent leur passage à Saint-Louis à une révision de l'appareil avant le survol des territoires hostiles. Le 16 et le 17, ils remontent vers Casablanca par Port Etienne et Villa Cisneros. Après quelques jours au Maroc, ils repartent le 21 pour Tanger. Le lendemain, ils passent à Alicante, Perpignan et font escale à Nîmes. Ils en repartent le 23 à 7h00 avant de se poser à Saint-Rambert d'Albon, puis Lyon dont ils repartent à 14h23 vers Le Bourget où ils se posent à 17h09.


            En mai 1932, le président de l'Aéro-Club du Roussillon, Alfred Sarda, organise un transport de fruits par avion. Le 17 mai, Jacques de Sibour se rend à Perpignan. Le 19, il remonte à Paris des cerises de Céret qui seront offertes au Président de la République.


            Le 28 août, Jacques, Violette, leur fils Blaise et Damet quittent le Bourget pour leur propriété du Kenya. Un mauvais fonctionnement de la pompe à essence les oblige à atterrir à Romorantin. Repartis le 29, ils font escale à Angoulême puis rejoignent Perpignan. Repartis le 30 à 8h30, ils descendent pour s'arrêter à Alicante. Le 3 septembre, venant de Fez, il se pose à Sidi-Bel-Abbès. Ils traversent ensuite l'Algérie, la Tunisie, la Tripolitaine, s'arrêtant au Caire. Le 13 septembre, ils se posent à Wadi Halfa, puis descendent vers Nairobi par Khartoum, Malakal et Juba.

            Le 1° décembre, ils repartent par Juba, Malakal, El-Fasher, Ati, Fort Lamy, Gao, pour se poser à Reggan le 19 décembre. Le 27, le Farman se pose à Madrid. Bloqués par le brouillard, ils y restent quelques jours, Violette préférant rentrer en train à Paris. Après une escale à Perpignan le 4, le Farman transportant Jacques, son fils et Damet atterrit enfin au Bourget le 5 janvier 1933 vers 14h00. "Si l'équipage parait frais et dispos, l'avion a besoin d'une sérieuse toilette".

            Le 10 janvier, Jacques ramène le Farman à Toussus pour une révision générale.

Le F.291 "Safari IV" de Jacques de Sibour à l'automne 1932.

[© Michel Barrière]

"Safari IV" au départ du Bourget en août 1932 [Coll Sibour]


¤ Retour en Chine


            En janvier 1933, Jacques de Sibour se lance dans le commerce aéronautique, obtenant un soutien de Farman, Gnome-Rhône et Morane-Saulnier. Fin février, il part pour Saigon, il crée une société commerciale "Aero Trading Co" à Hong-Kong. Rejoint par Violette, il arrive à décrocher la vente au gouvernement du Fu-Kien de 3 MS 225 C1, avec une option sur 3 autres. En juillet, devant faire face à des difficultés de finalisation du contrat, Jacques aurait décidé de faire un geste en offrant son F.291 au gouvernement du Fu-Kien.

            Le dimanche 18 Juin 1933, le F.291 est signalé en voyage au Mans à l'occasion des 24 h; c'est la dernière mention de sa présence en France. Le contrat ayant été finalisé, les 3 MS-225 quittent Marseille par bateau à la mi-septembre. Arrivés à Haïphong fin octobre, ils furent transférés sur un navire britannique qui les déposa à Amoy au Fu-Kien début novembre. Il est vraisemblable que le F.291 les ait accompagnés.


            Le 17 novembre 1933, les forces gouvernementales chinoises de Tchang Kaï-Chek attaquent le Fu-kien. L'Armée Révolutionnaire du Peuple doit capituler le 22 janvier 1934; le Farman peut s'échapper un jour avant la capitulation vers le territoire français du Kouang-Tchéou-Wan. Saisi par les autorités françaises, il aurait été rendu au gouvernement central chinois. On perd ensuite sa trace. Cependant, en mars 1935, un rapport américain signale la présence d'un appareil français à cabine fermée et moteur supposé de 230 cv, qui pourrait bien être le F.291, à l'école d'aviation de Shangsha...

Les Avions Farman

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F.291 n°1 F-ALEZ